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18 mars 2019Communiqués

Lettre à la ministre de la Santé et des Services sociaux et au ministre délégué à la Santé et aux services sociaux sur les services de protection de l'enfance et de la jeunesse au Nunavik

La Commission fait part à ces deux ministres de sa préoccupation concernant les services en protection de l’enfance et de la jeunesse offerts aux enfants du Nunavik. En 2010, la Commission avait publié un rapport de suivi sur la mise en œuvre de ses recommandations suite à son enquête menée en 2007. Ce rapport concluait que même si l’on avait observé des efforts importants de la part de tous les organismes régionaux, la situation demeurait précaire et continuait de susciter un sentiment d’urgence.

 

Montréal, le 18 mars 2019

Madame Danielle McCann, ministre de la Santé et des Services sociaux
Monsieur Lionel Carmant, ministre délégué à la Santé et aux services sociaux
Ministère de la Santé et des Services sociaux
Édifice Catherine-de-Longpré
1075, chemin Sainte-Foy, 15e étage
Québec (Québec) G1S 2M1

 

Objet : Services de protection de l’enfance et de la jeunesse au Nunavik

Madame la Ministre,
Monsieur le Ministre délégué,

La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (« la Commission ») souhaite vous faire part qu’elle est fort préoccupée concernant les services en protection de l’enfance et de la jeunesse offerts aux enfants du Nunavik. En 2010, la Commission a publié un rapport de suivi sur la mise en œuvre de ses recommandations de 2007 suite à son enquête sur les services de protection de l’enfance et de la jeunesse au Nunavik. Dans ce rapport, la Commission concluait que même si l’on avait observé des efforts importants de la part de tous les organismes régionaux, la situation demeurait précaire et continuait de susciter un sentiment d’urgence.

En 2014, interpellée dans huit dossiers d’enfants de la baie d’Ungava, la Commission alerte la ministre de la Justice et le ministre de la Santé et des services sociaux au sujet de la protection des enfants du Nunavik, et sollicite une intervention d’urgence de leur part devant ces situations persistantes et récurrentes d’enfants en danger, en raison notamment de leurs conditions de vie, des conditions économiques et sociales de leur milieu, de la situation du logement, de l’organisation déficiente des services de santé et des services sociaux et de la situation précaire du filet de sécurité disponible aux enfants, qui s’avèrent pratiquement inexistants.

La Commission a alors organisé 16 rencontres auxquelles ont participé 23 intervenants des secteurs politiques, administratifs, clinique, santé et services sociaux, éducation, justice, ainsi que des membres de la communauté. Constatant que les problématiques vécues par les enfants et les jeunes ne devaient pas être réduites aux problématiques relatives à la protection de la jeunesse, la Commission a pris la décision de se rendre à Kuujjuaq, en septembre 2016, afin d’ouvrir le dialogue avec les communautés.

Plusieurs grands constats ont émergé de ce dialogue entre la Commission et les leaders locaux et ont mené à l’élaboration de propositions d’une série d’actions afin d’adresser les différentes problématiques concernant l’habitation, l’éducation, la toxicomanie, la protection et le système judiciaire. Ces actions sont inscrites dans un plan d’action adopté par les autorités du Ministère de la Santé et des services sociaux et des communautés locales. La Commission invite régulièrement les responsables de sa mise en œuvre à suivre l’évolution de ce plan.

En mars 2018, la Commission présentait ces constats à la Commission d’enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec : écoute, réconciliation et progrès.

Malheureusement, dans son témoignage, elle ne pouvait qu’exprimer la récurrence des mêmes problématiques et constats dans ses enquêtes.

En novembre dernier, la Commission présentait la conclusion d’un rapport d’enquête, pour décision aux membres de son comité des enquêtes, qui démontre clairement que les constats ayant mené à l’élaboration du plan d’action au Nunavik sont toujours bien actuels. La Commission s’est penchée sur le drame médiatisé d’une fillette de 11 ans, retrouvée morte d’hypothermie, intoxiquée, 4 jours après qu’elle avait été vue pour la dernière fois. Sa disparition n’avait été signalée à la police que la veille où on l’a retrouvée. Ce drame met en lumière les problèmes qui persistent et l'urgence de les régler. Parmi les éléments problématiques relevés par l’enquête : le manque de diligence et les lacunes dans le traitement des multiples signalements depuis sa naissance, n’ayant donné lieu qu’à des interventions ponctuelles, ne permettant pas d’assurer la sécurité et la protection de l’enfant, les lacunes au niveau des services offerts à l’enfant et sa famille par les services sociaux, le manque de personnel tant du côté de la DPJ que du Centre de santé et de l’école, le manque de services de 1ère ligne et de services spécialisés pour soutenir les victimes d'abus sexuels, traiter les dépendances, les problèmes de santé mentale, accompagner les couples ou les familles en difficulté et la pénurie criante de logements, très souvent montrée du doigt par les intervenants de la région comme étant une source importante de problèmes sociaux graves.

Pour la sécurité et le développement des enfants et des jeunes du Nunavik un rappel s’impose. Les divers problèmes constatés en ce qui a trait à l'application de la Loi sur la protection de la jeunesse auprès des enfants et des jeunes du Nunavik et de leur famille persistent. Considérant la volonté des membres des communautés du Nunavik de s’occuper du bien-être des enfants de leurs communautés, et considérant la détresse de leurs enfants et la nécessité d'intervenir afin de prévenir la détérioration de leur situation, la Commission réitère l’urgence d’agir afin de réunir les conditions favorables auprès de ces communautés leur permettant d’assurer, enfin, une réelle protection de leurs enfants et le respect de leurs droits par la mise en œuvre de mesures de soutien concrètes, notamment par l’affectation des ressources suffisantes permettant de résoudre les problématiques urgentes liées au logement, à l’éducation, à la toxicomanie et à l’accès aux services de santé et aux services sociaux en matière de protection de la jeunesse.

Nous demeurons disponibles pour discuter de la présente à une date qui vous conviendra, et veuillez recevoir, madame la Ministre, monsieur le Ministre délégué, mes salutations distinguées.

Philippe-André Tessier
Président