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1 septembre 2017Lettres et allocutions

Lettre au ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale sur le Règlement modifiant le Règlement sur l’aide aux personnes et aux familles

​Voici les commentaires et recommandations de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse relatifs au projet de Règlement modifiant le Règlement sur l’aide aux personnes et aux familles.

Le 9 août 2017

Monsieur François Blais
Ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale
et ministre de la région de la Capitale-Nationale
425, rue Jacques-Parizeau, 4e étage
Québec (Québec) G1R 4Z1

Objet : Commentaires de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse relatifs au projet de Règlement modifiant le Règlement sur l’aide aux personnes et aux familles

Monsieur le Ministre,


Conformément au mandat que lui confère la Charte des droits et libertés de lapersonne1 la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse2 a procédé à l’analyse du projet de Règlement modifiant le Règlement sur l’aide aux personnes et aux familles3 publié dans la Gazette officielle du Québec le 12 juillet2017.

Dans le cadre de son analyse du Projet de loi   70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l’emploi ainsi qu’à favoriser l’intégration en emploi4, la Commission s’est dite fort préoccupée de l’impact qu’aura l’instauration du Programme objectif emploi5.

Ce projet de loi a été adopté et sanctionné depuis6, sans que les recommandations formulées par la Commission n’aient été prises en compte.

Le projet de règlement qui fait l’objet de la présente découle de cette loi et des modifications qu’elle apporte à la Loi sur l’aide aux personnes et aux familles7. La Commission tient donc à réitérer les préoccupations qu’elle a exprimées à ce sujet. Au terme de son analyse du projet de règlement, et compte tenu des adaptations nécessaires, la Commission souhaite en outre renouveler certaines recommandations faites eu égard au Programme objectif emploi, toujours pertinentes en l’espèce.

LE DROIT, EN PLEINE ÉGALITÉ, À DES MESURES D’ASSISTANCEFINANCIÈRE SUSCEPTIBLES D’ASSURER UN NIVEAU DE VIE DÉCENT

En vertu de l’article 1 du projet de règlement, on prévoit modifier le Règlement sur l’aide aux personnes et aux familles afin d’y préciser que toute référence au Programme objectif emploi est une référence au programme établi en vertu de laLoi8. La même disposition vise à ajouter un deuxième alinéa à l’article 3 du Règlement sur l’aide aux personnes et aux familles, lequel alinéa se lit comme suit :«Toute référence à un programme d’aide financière de dernier recours vise le Programme d’aide sociale ou le Programme de solidarité sociale »9.

Le projet de règlement reprend donc l’orientation retenue dans la Loi dont il découle, distinguant les programmes d’aide financière de dernier recours — que sont le Programme d’aide sociale et le Programme de solidarité sociale — d’un Programme d’objectif emploi qui, lui, conditionne l’assistance financière offerte aux personnes dans le besoin à leur participation à un programme d’insertion ou de réinsertion à l’emploi. L’instauration du Programme objectif emploi mène à l’exclusion corrélative des personnes visées par celui-ci du Programme d’aide sociale.

La Commission l’a répété à maintes reprises, l’objectif d’insertion ou de réinsertion à l’emploi des personnes inscrites à un programme d’aide sociale est louable et l’offre de mesures d’aide permettant d’y arriver est nécessaire10. Il est toutefois important de bien distinguer le droit à des mesures d'assistance financière du droit à des mesures d’aide à l’emploi.

Pourtant, le Programme objectif emploi confond les deux. En conditionnant l’aide financière de dernier recours, il risque de porter atteinte au droit aux mesures d’assistance financière susceptibles d’assurer un niveau de vie décent. Rappelons que l’article 45 de la Charte garantit ce qui suit à ce sujet : « Toute personne dans le besoin a droit, pour elle et sa famille, à des mesures d’assistance financière et à des mesures sociales, prévues par la loi, susceptibles de lui assurer un niveau de vie décent ».

La Commission a souligné à plusieurs reprises que ce droit s’impose « comme critère fondamental qui doit présider à l’élaboration de toute politique de sécurité du revenu »11. Ainsi, « une loi de dernier recours ne peut exclure les personnes qui bien que désignées “sans contrainte” ne peuvent atteindre un objectif donné d’autonomie économique ou d’inclusion de ses finalités sans nier son objectif intrinsèque d’assurer un niveau de vie décent aux plus démunis »12.

Retenons également que l’article 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme protège le droit de toute personne « à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires »13.

Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, auquel le Québec s'est engagé14, reconnaît, en outre, le droit de toute personne « à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu’à une amélioration constante de ses conditions d’existence »15. Tel que le souligne la professeure Lucie Lamarche, le PIDESC « confère, à son article 11, un caractère distinct et autonome au droit à un niveau de vie suffisant »16.

C’est pourquoi le droit à des mesures d’assistance financière susceptibles d'assurer un niveau de vie décent ne peut être conditionné par la participation à un programme d'aide à l’emploi tel que le prévoit le Programme objectif emploi. Ainsi qu’elle le notait dès 1998, les mesures de recherche d’emploi et démarches de revalorisation des compétences « ne sauraient se substituer à l’aide accordée pour combler les besoins essentiels des personnes et familles pauvres »17. La Charte établit plutôt que toute personne dans le besoin et sa famille ont droit aux mesures d’assistance financière prévues par la loi. Le bénéfice de ce droit ne peut être réservé qu’aux seules personnes qui participent à un programme d’insertion au travail.

EFFETS DISCRIMINATOIRES

La Commission est en outre particulièrement préoccupée par les effets discriminatoires que risque d’avoir la mise en oeuvre du Programme objectif emploi pour les personnes qui doivent avoir recours à un programme d’aide financière. Elle rappelle à cet égard qu’il vise des personnes déjà largement stigmatisées en raison de leur condition sociale, un motif de discrimination interdite par la Charte. Le Tribunal des droits de la personne le soulignait d’ailleurs dans l’affaire Whittom :« la pauvreté engendre des situations de marginalisation, d’exclusion et d'isolement social et “ces situations sont renforcées par le jugement attaché à cette catégorie sociale” »18.

Plus récemment, un rapport de recherche remis à la Commission à l’occasion du40e anniversaire de la Charte19 confirme l’ampleur des préjugés et stéréotypes qui ciblent les personnes prestataires d’un programme d’aide sociale.

Ce rapport révèle que 49,1 % des Québécois affirment entretenir une opinion négative à l’égard des prestataires de l’aide sociale et que « la figure de “l’assisté social” est clairement l’objet d’une forme de stigmatisation »20.

Or, comme l’a déjà souligné la Commission, cette stigmatisation mène notamment à ignorer les causes structurelles de la pauvreté. Elle se traduit alors en attitudes, pratiques et politiques discriminatoires qui jouent un rôle déterminant dans l’exclusion sociale des personnes prestataires de l’aide sociale et qui ont entre autres pour effet de limiter leur possibilité d’insertion ou de réinsertion à l’emploi. Une étude conduite par votre ministère en 200621 révélait d’ailleurs « qu’au regard du marché du travail, les obstacles s’accumulent même chez les prestataires sans contrainte à l’emploi »22.

Cette stigmatisation risque d’être encore plus importante lorsque le motif condition sociale s’entrecroise avec d’autres motifs de discrimination, notamment la « race »,la couleur, l’origine ethnique ou nationale, le sexe, l’identité ou l’expression de genre, l’état civil ou l’âge, le handicap ou le moyen pour pallier celui-ci. On doit ainsi tenir compte de l’approche intersectionnelle de la discrimination.

C’est pourquoi la Commission « n’a cessé de souligner l’importance d’aborder le phénomène de la pauvreté dans une perspective systémique qui, seule, permet de comprendre l’engrenage de la pauvreté et de la discrimination vécue par les personnes en situation de pauvreté »23. Le Programme objectif emploi ne s’inscrit pas dans une telle perspective et repose plutôt sur une approche fondée sur la responsabilité individuelle. En ce sens, il est susceptible d’accroître la discrimination systémique vécue par les personnes visées.

C’est à la lumière de ces considérations que la Commission a déjà recommandé de modifier le Programme objectif emploi de façon à ce que la participation aux mesures d’aide à l’emploi proposées ne conditionne pas la reconnaissance et l’exercice en pleine égalité du droit à des mesures d’assistance financière et des mesures sociales susceptibles d’assurer un niveau de vie décent24.

Tout en tenant compte que les dispositions législatives relatives au Programme objectif emploi sont maintenant adoptées et sanctionnées, la Commission souhaite réitérer ses préoccupations et les recommandations qu’elle a formulées au sujet du Programme objectif emploi.

La Commission note que le nouvel article 83.1 de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles prévoit que l’obligation de participer au Programme objectif emploi ne s’applique que « dans les cas et aux conditions prévus par règlement »25. Il est donc encore possible de modifier le projet de règlement et de redéfinir ces « cas et conditions » de façon à minimiser les effets du Programme sur la reconnaissance et l’exercice en pleine égalité du droit à des mesures d’assistance financière et des mesures sociales susceptibles d’assurer un niveau de vie décent.

Plus particulièrement, la Commission recommande de ne pas édicter le Chapitre V, intitulé Manquements aux engagements, que l’article 24 du projet de règlement propose d’introduire au Règlement sur l’aide aux personnes et aux familles.

Recommandation 1 : La Commission recommande de ne pas édicter le Chapitre V, intitulé Manquements aux engagements, que l’article 24 du projet de règlement propose d’introduire au Règlement sur l’aide aux personnes et aux familles.

UNE APPROCHE D’INTÉGRATION À L’EMPLOI FONDÉE SUR LES DROITS ETLIBERTÉS DE LA PERSONNE

L’objectif, fort important, d’insertion ou de réinsertion à l’emploi participe par ailleurs du droit au travail reconnu par de nombreux instruments de droit international. Citons, par exemple, l’article 6 du PIDESC en vertu duquel les États parties« reconnaissent le droit au travail, qui comprend le droit qu’a toute personne d’obtenir la possibilité de gagner sa vie par un travail librement choisi ou accepté, et prendront des mesures appropriées pour sauvegarder ce droit »26. Cette disposition énonce en outre que les mesures à prendre à ce chapitre « doivent inclure l’orientation et la formation techniques et professionnelles, l’élaboration de programmes, de politiques et de techniques propres à assurer un développement économique, social et culturel constant et un plein emploi productif dans des conditions qui sauvegardent aux individus la jouissance des libertés politiques et économiques fondamentales »27.

La Commission l’a déjà souligné, ces mesures d’aide à l’emploi ne peuvent aller à l’encontre des autres droits et libertés de la personne exercés dans le contexte de l’emploi.

Certes, le projet de règlement prévoit qu’un participant peut refuser un emploi offert sans que cela entraîne une sanction si celui-ci contrevient à une disposition de la Charte ou de la Loi sur les normes du travail28. Il en est de même s’il est soumis à des conditions de travail « susceptibles de mettre en danger sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique ou psychologique »29, si l’emploi offert est inoccupé à la suite d'une grève ou d’un lock-out30, si l’horaire de travail est incompatible avec ses obligations familiales31, etc.

Le projet de règlement établit en outre que l’abandon d’un emploi par un participant ne constitue pas un manquement à son obligation en certaines circonstances, notamment s’« il a été victime de discrimination fondée sur des motifs prévus à la Charte »32, s’« il a été victime de harcèlement psychologique ou sexuel au travail »33, s’« il a fait l’objet d’intimidation, d’une mesure discriminatoire ou de représailles ou d'une menace de congédiement en raison de son appartenance à une association de travailleurs ou parce qu’il a exercé un droit reconnu par une loi »34, etc.

Néanmoins, la Commission tient à rappeler que le fait même que le consentement un emploi soit conditionné par une sanction importante, telles que celles que prévoit le projet de règlement35, est susceptible de contrevenir à la Charte. La Commission l’a déjà souligné, « cette obligation d’accepter un emploi sous peine de sanction contrevient au droit à la liberté de sa personne reconnu à l’article premier de la Charte qui énonce que “tout être humain a droit à la vie, ainsi qu’à la sûreté, l’intégrité et à la liberté de sa personne" »36. La liberté de sa personne, dans le contexte du travail, se traduit par la liberté du travail37.

Le consentement dans le contexte du travail subordonné est en outre nécessaire

sous peine d’atteinte à la dignité de la personne38. Comme l’indique le professeur Verge : « Le travail subordonné ne peut qu’être librement assumé; la dignité de la personne, tant en droit interne que dans celui des nations, n’accepte pas le travail forcé »39.

Le droit international attache d’ailleurs une importance particulière à la liberté de travail en tant que composante du droit au travail. Référons encore une fois à la DUDH qui énonce le droit « au libre choix de son travail »40. Le PIDESC engage également les États parties à reconnaître « le droit [...] d’obtenir la possibilité de gagner sa vie par un travail librement choisi ou accepté »41.

Rappelons que le Comité des droits économiques sociaux et culturels des Nations Unies, dans les observations finales de 1998 faisant suite à l’examen du rapport déposé par le Canada, a noté avec préoccupation l’adoption de programmes de travail obligatoire conditionnant le droit à l’aide sociale. Ce comité avait alors exhorté le gouvernement du Canada ainsi que les gouvernements provinciaux et territoriaux« à réviser leurs législations respectives en matière de programmes de travail obligatoire pour s’assurer qu’elles ne contiennent aucune disposition contraire au droit de choisir librement son emploi et aux autres normes relatives au travail, notamment le salaire minimal, qui sont garantis non seulement dans le Pacte, mais également dans les conventions pertinentes de l’OIT sur les droits fondamentaux des travailleurs et les normes du travail »42. Alors que la mise en oeuvre de la Loi sur l’aide aux personnes et aux familles a éliminé toute possibilité de réduire la prestation du Programme d’aide sociale « pour défaut d’entreprendre des démarches en vue d’intégrer le marché du travail, notamment en cas de refus, d’abandon ou de perte d’emploi »43, le Programme objectif emploi constitue un retour en arrière à cet égard44.

L’obligation de maintenir le lien d’emploi sous peine de sanction que prévoit le projet de règlement est également susceptible de porter atteinte aux droits garantis par la Charte, en particulier au droit à la liberté de sa personne, au droit à la sauvegarde de sa dignité et au droit à des conditions de travail justes et raisonnables et qui respectent sa santé, sa sécurité et son intégrité45.

Recommandation 2 : La Commission recommande à nouveau de modifier le projet de règlement de façon à ce que, sans préjudice à leur droit à des mesures financières et à des mesures sociales qui leur assure un niveau de vie décent, lequel constitue un droit autonome, les participants au Programme objectif emploi puissent a) contribuer à la détermination du caractère convenable de l’emploi qui leur est offert, notamment en fonction de leurs caractéristiques et situation personnelles, b)conserver leur faculté de démission sans pénalité sous réserve des dispositions du droit du travail applicables et c)jouir du droit d’appartenir à un syndicat46.

Subsidiairement, la Commission recommande de modifier le paragraphe 177.14(1a) que prévoit introduire l’article 24 du projet de règlement afin d’y référer également au Code du travail47.

Dès 1988, la Commission faisait part de ses craintes quant à l’effet d’une clause qui permet ainsi d’exclure les personnes bénéficiant d’un programme d’employabilité des garanties offertes par le droit du travail, écrivant notamment ce qui suit :

« À la limite, le projet de loi risque d’aboutir, comme plusieurs l'ont fait remarquer, à la création d'un bassin de main-d’oeuvre à bon marché ne bénéficiant pas des garanties normalement reconnues aux travailleurs. Pourront ainsi se retrouver côte à côte, au sein d'une même entreprise, des travailleurs jouissant de conditions de travail négociées (ou fixées, à défaut, par la loi) et des prestataires faisant le même travail, mais ne bénéficiant ni des mêmes salaires, ni des mêmes conditions de travail en général. »48

La Commission déplore à nouveau « l’injustice faite à une population déjà vulnérable »49 que constitue cette atteinte au droit à la liberté d’association50, au droit à un traitement ou un salaire égal pour un travail équivalent et au droit à des conditions de travail justes et raisonnables, lesquels sont garantis par la Charte51.

Recommandation 3 : Subsidiairement à la recommandation 2, la Commission recommande de modifier le paragraphe 177.14 (1a) que prévoit introduire l’article 24 du projet de règlement afin d’y référer également au Code du travail.

Toujours de façon subsidiaire à la recommandation 2, la Commission recommande d’élargir l’exception relative au harcèlement prévue à l’article 117.15 al. 2(2)qu’introduirait l’article 24 du projet de règlement52 à toutes les formes de harcèlement contraires à l’article 10.1 de la Charte. Ainsi, le harcèlement discriminatoire peut être sexuel ou psychologique, mais il peut aussi prendre d’autres formes. Il peut en outre être fondé sur différents motifs de discrimination interdite par la Charte. Il peut s’agir de harcèlement racial, transphobe ou homophobe. Il peut également être fondé sur l’âge, le handicap ou la religion53.

Dans tous les cas, le harcèlement discriminatoire compromet le droit à l’égalité desvictimes54, mais aussi leur droit à l’intégrité, à la sauvegarde de la dignité de la personne et à des conditions de travail justes et raisonnables55.

La recommandation que formule la Commission à cet égard est d’autant plus importante qu’on constate qu’une organisation discriminatoire du travail par exemple dans le cadre d’emplois précaires entraîne un plus grand risque de harcèlementdiscriminatoire56.

Recommandation 4 : Subsidiairement à la recommandation 2, la Commission recommande d’élargir l'exception relative au harcèlement prévue à l’article 117.15 al. 2(2) qu’introduirait l'article 24 du projet de règlement à toutes les formes de harcèlement contraires à l’article 10.1 de la Charte.

Enfin, la Commission profite de l’occasion pour réitérer l’importance de définir les mesures d’aide à l’emploi en tenant compte des facteurs d’ordre systémique qui caractérisent le marché de l’emploi et constituent des obstacles auxquels doivent faire face les personnes inscrites à un programme d’aide sociale. Pensons notamment à la discrimination en emploi qui vise plus particulièrement certains groupes de la population. À défaut, les mesures d’aide risquent plutôt d’accroître les difficultés liées à ces obstacles et de maintenir les personnes visées en marge du marché de l’emploi57.

Nous demeurons à votre disposition pour toute question relative à la présente.

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos sentiments distingués.

Me Tamara Thermitus, Ad. E.
Présidente


1 Charte des droits et libertés de la personne, RLRQ, c. C-12 (ci-après « Charte »).
2 Ci-après « Commission ».
3 Règlement modifiant le Règlement sur l’aide aux personnes et aux familles (projet), 149 G.O.Il, 3039 (ci-après « projet de règlement »).
4 Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, projet de loi 70 (présentation - 10 novembre 2015), 1re sess., 41e légis. (Qc).
5 Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, Mémoire à la Commission de l'économie et du travail de l'Assemblée nationale sur le Projet de loi 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l’emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, (Cat. 2.412.124), 2016, [En ligne].https://cdpdj.qc.ca/Publications/memoire_PL_70_emploi_pauvrete.pdf
6 Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l’emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, L.Q. 2016, c. 25.
7 Loi sur l’aide aux personnes et aux familles, RLRQ, c. A-13.1.1.
8 Règlement modifiant le Règlement sur l'aide aux personnes et aux familles (projet),préc., note 3, art. 1(1).
9Id., art. 1(2).
10 Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, préc., note 5, p. 4.
11 Id, p. 22; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, Commentairessur le projet de règlement modifiant le Règlement sur l'aide aux personnes et aux familles,(Cat. 2.412.66.9), 2013, p. 19, [En ligne].
https://cdpdj.qc.ca/Publications/commentaires_reglement-aide-personnes-famille.pdf :Commission des droits de la personne, Commentaires de la Commission des droits de lapersonne sur le projet de loi sur la sécurité du revenu, (Cat. 2.412-66.1 ), 1988, p. 27.
12 Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, Mémoire à laCommission des affaires sociales de l'Assemblée nationale sur le Projet de loi 57, Loi surl'aide aux personnes et aux familles, (Cat. 2.412-66.8), 2004, p. 10, [En ligne].
https://cdpdj.qc.ca/Publications/pl_57_aide_personnes_familles.pdf
13 Déclaration universelle des droits de l'homme, Rés. 217 A (III), Doc. off. A.G. N.U., 3e sess.,suppl. 13, p. 17, Doc. N.U. a/810 (1948), art. 25 (ci-après « DUDH »).
14 Arrêté en conseil 1438-76 concernant le Pacte international relatif aux droits économiques,sociaux et culturels, (1984-1989) Recueil des ententes internationales du Québec 818.
15 Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, 16 décembre 1966,[1976] R.T. Can., 46, art. 11 (entré en vigueur au Canada le 19 août 1976) (ci-après« PIDESC »).
16 Lucie Lamarche, Perspectives occidentales du droit international des droits économiques dela personne, Bruxelles, Éditions Bruylant, 1995, p. 335.
17 Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, Mémoire sur le Projet deloi 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale,(Cat. 2.412.66.7), 1998, p. 10.
18 Commission des droits de la personne du Québec c. Whittom, J.E. 94-319 (T.D.P.Q.), par. 16,conf. par Whittom c. Commission des droits de la personne, [1997] R.J.Q. 1823 (C.A.).
19 Pierre Noreau, Emmanuelle Berhneim, Pierre-Alain Cotnoir, Pascale Dufour, Jean-HermanGuay et Shauna Van Praagh, Droits de la personne et diversité, Rapport de recherche remisà la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, 2015, [En ligne].http://www.crdp.umontreal.ca/files/sites/101/2016/01/Rapport_Final_Diversite_Droits_Commission_2016.pdf
20 Id., p. 68.
21 Ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Bulletin d'information de la Directiongénérale des politiques, Pour certains prestataires de l'assistance-emploi, les obstacless'accumulent, Vol. 1, 2, février 2006.
22 Protecteur du citoyen, Rapport annuel 2006-2007, Québec, juin 2007, p. 55, [En ligne].https://protecteurducitoyen.qc.ca/sites/default/files/pdf/rapports_annuels/2006-07/RA_Gestion_0607.pdf 
23 Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse,Mémoire à la Commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale sur le Projet de loi 112 - Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, (Cat. 2.412.97), 2002, p. 13, [En ligne].https://cdpdj.qc.ca/Publications/PL_112_pauvrete.PDF
24 Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, préc., note 5, p. 48.
25 Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l’emploi ainsi qu’àfavoriser l'intégration en emploi, préc., note 6, art. 31 (art. 83.1 al. 2).
26 Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, préc., note 15, art. 6 al.1.
27 ld., art. 6 al. 2.
28 Règlement modifiant le Règlement sur l'aide aux personnes et aux familles (projet),préc., note 3, art. 24 (117.14(1a)).
29 Id., art. 24 (117.14(1 b)).
30 Note 3
31 Id., art. 24(117.14(2)).
32 Id., art. 24(117.14(3)).
33 Id., art. 24 (117.15 al. 2(1)).
34 Id., art. 24 (117.15 al. 2(2)).
35 Id., art. 24 (117.15 al. 2(3)).
36 Id., art. 24(177.41).
37 Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, préc., note 5, p. 26.Id.
38 Id.
39 Pierre Verge, « Le contrat de travail selon le Code civil du Québec : pertinence ou impertinence ? », (1993) 24 R.G.D. 237, 239.
40 Déclaration universelle des droits de l'homme, préc., note 13, art. 23(1°).
41 Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, préc., note 15, art. 6 al.1. Voir également : Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, 20 novembre 1989, 1577 R.T.N.U. 3, [1992] R.T. Can. 3 (entrée en vigueur pour le Canada le 12 janvier 1992), art. 5e)i); Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, 18décembre 1990, Res. A.G. 45/158 (Annexe) 30 I.L.M. 1521 (1991), art. 52 (1°) et Convention( 122) sur la politique de l'emploi de l'Organisation internationale du travail, 9 juillet 1964,569 R.T.N.U. 65, (entrée en vigueur pour le Canada le 15 juillet 1966), art, 1, al. 2c).
42 Organisation des Nations Unies (Comité des droits économiques, sociaux et culturels),Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels : Canada,E/C.12/1/Add.31, Genève, ONU, 1998, par. 55.
43 Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, préc., note 7, art. 59.
44 Retenons à ce propos que, selon le Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l'ONU : « Tout laisse supposer que le Pacte interdit toute mesure rétrograde en matière de droit à la sécurité sociale. Si un État partie prend une mesure délibérément rétrograde, il lui appartient de prouver qu’il l'a fait après avoir mûrement pesé toutes les autres solutions possibles et que cette mesure est pleinement justifiée eu égard à l’ensemble des droits visés dans le Pacte dans le contexte de l'utilisation au maximum des ressources disponibles. Le Comité déterminera avec soin si : a) la mesure était fondée sur un motif raisonnable; b) les autres solutions ont été examinées en profondeur; c) les groupes concernés ont véritablement participé à l'examen des mesures et des autres solutions proposées; d) les mesures étaient directement ou indirectement discriminatoires; e) ces mesures auront un impact durable sur la réalisation du droit à la sécurité sociale, des retombés déraisonnables sur des droits acquis à la sécurité sociale, ou elles priveront un individu ou un groupe de l'accès minimum aux éléments essentiels de la sécurité sociale; f) les mesures ont été examinées de manière indépendante à l'échelon national. » (nos soulignés) Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Observation générale 19 : Le droit à la sécurité sociale (art. 9 du Pacte),Doc. N.U. E/C.12/GC/19 (4 février 2008), par. 41, [En ligne]:http://www2.ohchr.org/enqlish/bodies/cescr/comments.htm
45 Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, préc., note 5, p. 30.
46 Id., p. 48.
47 Code du travail, RLRQ, c. C-27.
48 Commission des droits de la personne (1988), préc., note 11, p. 25.
49 Id., p. 26.
50 Rappelons d'ailleurs que la Cour suprême a récemment mis à jour sa conception de la liberté d’association. Voir à ce sujet : Association de la police montée de l'Ontario c. Canada (P.G.),2015 CSC 1; Meredith c. Canada (P.G.) 2015 CSC 2; Saskatchewan Fédération of Labour c.Saskatchewan, 2015 CSC 4.
51 Chart