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23 janvier 2019Lettres et allocutions

Lettre ouverte au journal Le Devoir sur l'inclusion scolaire des élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (HDAA)

Le titre de l’éditorial de Marie-Andrée Chouinard dans Le Devoir du 8 janvier dernier fait tragiquement écho à une inquiétude exprimée par un ancien président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, Gaétan Cousineau, qui signait une lettre ouverte il y a dix ans : « Situation des élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage dans les écoles québécoises : Pour éviter un retour en arrière, une école inclusive s’impose ».

Le titre de l’éditorial de Marie-Andrée Chouinard dans Le Devoir du 8 janvier dernier fait tragiquement écho à une inquiétude exprimée par un ancien président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, Gaétan Cousineau, qui signait une lettre ouverte il y a dix ans : « Situation des élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage dans les écoles québécoises : Pour éviter un retour en arrière, une école inclusive s’impose ».

L’éditorial du Devoir réagit au souhait exprimé par le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, d’ajouter des classes spécialisées pour répondre aux besoins d’un nombre sans cesse grandissant d’élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (HDAA). La Commission tient elle aussi à exprimer son inquiétude quant à cette approche.

L’ouverture d’un grand nombre de classes spéciales pour pallier le manque de ressources qui viennent en appui aux activités des classes ordinaires constituerait un retour en arrière par rapport aux principes de la Charte des droits et libertés de la personne, de la Loi sur l’instruction publique et des encadrements du ministère. Il s’agirait d’une rupture importante par rapport aux actions qui ont été menées depuis près de 20 ans pour favoriser le respect des droits des élèves HDAA dans le système scolaire québécois.

Chaque élève a son propre profil : on ne peut pas présumer qu’en fonction d’un diagnostic, l’élève aurait des caractéristiques identiques à celles de tous les autres élèves qui partagent le même diagnostic. Avant de décider de placer un élève en classe ordinaire ou en classe spéciale, il faut pouvoir faire une évaluation individualisée de ses besoins et capacités, afin de déterminer quel est le contexte d’apprentissage qui lui est le plus profitable, et qui est dans son intérêt à lui – c’est ce que la jurisprudence des trente dernières années a toujours indiqué.

Devant le nombre grandissant d’élèves HDAA - plus de 20 % des élèves qui fréquentent le réseau public actuellement, soit 1 élève sur 5 - la solution n’est pas d’orienter davantage de ces élèves vers des classes spéciales, mais de viser le juste équilibre qui permet que, peu importe où ces élèves se trouvent, ils auront la garantie de recevoir des services adaptés qui leur permettront de bénéficier de l’enseignement donné, de s’épanouir comme personne et éventuellement, de jouer un rôle actif et valorisant dans la société.

L’élève doit être appuyé par des mesures concrètes qu’il soit en classe ordinaire ou en classe spécialisée. Cela suppose que l’on pense autrement l’école pour qu’elle soit inclusive. Si on veut garantir l’égalité des chances pour tous les élèves québécois, c’est même un impératif absolu.

Au printemps dernier, la Commission a publié les résultats d’une importante étude systémique sur la situation des services éducatifs destinés aux élèves HDAA dans le réseau scolaire québécois. Cette étude fait un constat alarmant, constatant que sur le terrain, les atteintes au droit sont encore nombreuses. Sans soutien direct à l’élève et sans soutien aux enseignants qui sont responsables des classes ordinaires, on assiste à la situation qui est maintes fois relatée dans les médias : celles d’enfants qui sont laissés à eux-mêmes, sans services ou avec des services qui ne répondent pas adéquatement à leurs besoins, des enseignants au bout du rouleau, des parents qui se battent sans arrêt pour assurer le plein développement de leurs enfants, de l’argent public qui est utilisé pour exercer des recours judiciaires plutôt que d’offrir des conditions propices à une intégration harmonieuse de ces élèves.

Finalement, c’est nous tous qui en sortons perdants, en laissant de côté 20 % de nos enfants. Il faut rappeler qu’à l’heure actuelle, près de 40 % des élèves HDAA sortent de l’école secondaire sans diplôme, ni qualification. L’impact est majeur pour notre société : ce sont des enfants qui, rendus à l’âge adulte, ne pourront exercer un rôle valorisant dans notre société.


Philippe-André Tessier, président par intérim
Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse
23 janvier 2019


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