NON au racisme et à la discrimination des jeunes à l’école !

En tant que parent, vous vous attendez à ce que l’école soit un endroit sain et sécuritaire qui assure l’instruction, la socialisation et la qualification de votre enfant. En tant que parent d’enfant racisé, né ici ou immigrant, et autochtone, vous constatez que votre enfant peut être davantage surveillé, sanctionné et expulsé que les autres. La Commission Laurent et la Commission Viens l’ont confirmé : les élèves racisés et autochtones sont signalés de manière disproportionnée au sein de l’école québécoise. La surveillance ciblée des élèves racisés, les stéréotypes liés à leurs comportements et le recours démesuré à des mesures disciplinaires envers eux se perpétuent dans le milieu scolaire. Or, les initiatives sont encore insuffisantes pour mettre fin à la discrimination systémique et au profilage racial, comme le souligne la Commission des droits dans un rapport et un bilan publiés à neuf ans d’intervalle et des travaux menés sur ces enjeux depuis 17 ans.
La Charte des droits et libertés de la personne du Québec interdit depuis son adoption, il y a 50 ans, la discrimination ou le harcèlement fondés sur la « race », la couleur, l’origine ethnique ou nationale, mais aussi sur plusieurs autres motifs. Elle protège les droits et libertés des enfants et des adolescents, en particulier, leur droit à l’instruction publique gratuite, et ce, en toute égalité. L’école devrait de ce fait être un sanctuaire pour tous les élèves.
Le racisme envers les jeunes dans les milieux éducatifs peut prendre plusieurs formes, dont la discrimination systémique et le profilage racial. La discrimination systémique peut s’illustrer par exemple par des préjugés négatifs entretenus par des membres du personnel qui lors de l’orientation scolaire d’élèves racisés, notamment des communautés noires, tendraient à les diriger vers des, tendraient à les diriger vers des programmes éducatifs moins qualifiants que ceux souhaités par ces élèves.
Le profilage racial se manifeste quant à lui dans l’application de sanctions disciplinaires disproportionnées à l’encontre de ces élèves. Plusieurs études rapportent que les élèves des communautés noires et les élèves autochtones sont signalés de manière disproportionnée par les directions d’école ou les services de police auprès du Directeur de la protection de la jeunesse. À ce titre, les enfants des communautés noires sont en moyenne presque quatre fois plus à risque que les enfants blancs d’être signalés auprès du DPJ au Québec (Boatswain-Kyte, 2023). Le personnel scolaire en position d’autorité a également recours, de manière démesurée, aux forces de l’ordre pour gérer les comportements dits « déviants » d’élèves noirs, filles ou garçons, alors que ces délits mineurs devraient être réglés dans le cadre scolaire. Ces formes de racisme ont un impact sur l’estime de soi et la dignité de ces élèves et de leur communauté.
La spirale école-DPJ-police et le pipeline école-prison pour ces élèves ont maintes fois été dénoncés. Ils ont comme conséquence de compromettre leurs droits et libertés, dont le droit à l’instruction publique en toute égalité. Owusu-Bempah et Jeffers rapportent que dans plusieurs villes canadiennes, dont Montréal, des adolescents des communautés noires n’ayant commis aucun délit avaient tout de même eu affaire à la justice. Ils ajoutent que l’école fait partie des principaux endroits où ces jeunes ont leurs premiers démêlés avec le système de justice pénale, notamment à la suite d’interventions policières survenues dans l’antre scolaire.
Souvent, pour comprendre les situations particulières et complexes que ces élèves vivent, il faut prendre en compte l’aspect intersectionnel du racisme et de la discrimination systémiques. Par exemple, un élève peut être discriminé sur la base de son origine ethnique, mais aussi de son âge, de son genre ou encore d’un trouble du comportement dont il souffre. Ces situations devront être alors examinées et traitées avec une perspective intersectionnelle mettant en cause plusieurs motifs de discrimination interdits par la Charte.
Certes, les parents sont conscients que des pratiques, politiques, processus décisionnels, codes de vie de l’école ainsi que les attitudes et comportements de certains membres du personnel scolaire portent préjudice à leur enfant. Même s’ils connaissent leurs droits, ils hésiteront souvent à porter plainte auprès de la direction d’école par crainte de représailles. De toute manière, la priorité pour le parent n’est pas de porter plainte, mais de trouver rapidement un milieu éducatif sécuritaire pour son enfant.
Nous sommes conscients des traumatismes - stress, anxiété, dépression - auxquels sont exposés les élèves victimes de discrimination, ainsi que des conséquences négatives sur leurs réussite éducative et parcours scolaire. En cette Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale, nous souhaitons réitérer nos recommandations à l’attention des organismes et des ministères concernés. La Commission informe tous les élèves et leurs parents que leurs droits sont protégés et que des recours existent dans les cas de discrimination.
Philippe-André Tessier
Président
Myrlande Pierre
Vice-présidente, responsable du mandat Charte
Pour souligner les 50 ans de la Charte des droits et libertés de la personne, la loi fondamentale du Québec, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse publie une série de lettres ouvertes sur divers thèmes afin de souligner l’importance de la Charte comme moteur de l’évolution du Québec depuis 50 ans et tous les défis que la Charte nous permet encore d’affronter collectivement.
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